
P. CARRÉ, Les avoueries des églises liégeoises, XI
e
-XV
e
siècles, ULg, 2008-2009
devenues si négligeable qu‟on ne prenait plus la peine de les mentionner dans les registres aux
fiefs
2503
. Quelle qu‟en soit la cause, cette situation est en tout cas révélatrice d‟un profond
déclin de l‟institution.
Un nombre relativement important d‟avoueries n‟en survécut pas moins jusqu‟à la
Révolution. Pour ne citer que quelques exemples remarquables, il en alla ainsi à Ciney,
Fosses, Huy, Liège, Waremme et Saint-Trond. Au sein de la mense épiscopale, le maintien
des avoueries est également observé jusqu‟à la fin du XVIII
e
siècle dans les domaines de
Horion et Nivelle-sur-Meuse et les bans de Fronville et de Verviers. Situation identique dans
la mense capitulaire, par exemple à Crisnée, à Amay Ŕ où le lignage des de Rochelée conserve
ses fonctions durant une période particulièrement longue : du XV
e
au XVIII
e
siècle
2504
Ŕ et,
bien entendu, dans l‟avouerie de Hesbaye. Enfin, dans les possessions des collégiales et des
abbayes, où les cas de survie tardive semblent plus rares, on n‟omettra pas de citer les
avoueries de Racour (Saint-Jean) et d‟Anthisnes (Saint-Laurent) qui apparaissent elles aussi
dans les sources jusqu‟à la fin de l‟Ancien Régime. Notons que si la plupart des données
relatives aux avoueries liégeoises s‟évanouissent avec la Révolution de 1789, divers actes de
reliefs indiquent que la restauration de la principauté épiscopale en 1791-1792 et 1793-
1794
2505
s‟ensuivit d‟une réintégration des avoués dans leurs charges. Du moins d‟une partie
d‟entre eux. Nous en trouvons notamment la trace en 1793 dans l‟avouerie de Hesbaye
2506
,
dans l‟avouerie urbaine de Saint-Trond
2507
ou encore dans les domaines de Saint-Laurent à
Angleur et de Saint-Jean à Cortil
2508
.
Car depuis la fin du Moyen Age, l‟avouerie n‟avait cessé de perdre sa raison d‟être. Cela se
traduisait notamment par l‟élargissement de l‟accès à la charge d‟avoué, jadis privilège de
l‟aristocratie militaire. Nous avons vu en abordant l‟aspect purement institutionnel des
avoueries que ce phénomène s‟amorça dès les deux derniers siècles du Moyen Age. Aux
Temps modernes, il ne fait que prendre de l‟ampleur.
Durant cette période, il est de plus en plus fréquent de rencontrer comme avoués non
seulement des magistrats urbains, tels que des échevins ou des bourgmestres, mais aussi des
représentants de la noblesse de robe ou encore des membres du haut clergé. C‟est ainsi que
des chanoines tréfonciers de Saint-Lambert nous apparaissent à plusieurs reprises comme
détenteurs d‟une avouerie. Par exemple Thierry de Celles, avoué de Furfooz au XVII
e
siècle.
Ou encore Maximilien-Henri-Joseph de Liedekercke, avoué de Horion entre 1784 et la fin de
l‟Ancien Régime. Un curé, certes noble puisqu‟il s‟agissait de Philippe de La Marck, fut
même pendant un temps détenteur de l‟avouerie de Dinant (1524-1529). Mais le cas le plus
frappant s‟avère sans doute celui de l‟avouerie de Hesbaye. Au cours des XVII
e
et XVIII
e
siècles, la plus importante des avoueries liégeoises était ainsi passée successivement de
l‟aristocratie militaire à un jurisconsulte, de Grati, avant d‟entrer en possession d‟une lignée
2503
Ce pourrait notamment être le cas à Furfooz où l‟avouerie n‟est plus citée dans la liste de reliefs à compter de
la fin du XVII
e
siècle. Cf. S. BORMANS, Seigneuries féodales, op.cit., p.100-104.
2504
S. BALAU, Modave..., op.cit., p.227-229 ; L.F. GENICOT, La tour d’Amay..., op.cit., p.81-82.
2505
Il y eut deux restaurations princières, la première entre le 12 janvier 1791 et le 27 novembre 1792, la seconde
entre mars 1793 et juillet 1794. Toutes deux furent suivies d‟une reconquête française. Cf. à ce sujet, E. HELIN,
La révolution liégeoise 1789-1795, La Révolution liégeoise de 1789, Bruxelles, 1989, p.37-52 et spécialement
p.45-49 ; P. HARSIN, La révolution liégeoise de 1789, Bruxelles, 1954.
2506
S. BORMANS, Ibidem, p.23-24
2507
F. STRAVEN, Inventaire des archives de Saint-Trond..., op.cit., t.VI, p.39.
2508
E. GERARD, Cantons d’Eghezée et d’Andenne, Namur, 1931, p.28.