
P. CARRÉ, Les avoueries des églises liégeoises, XI
e
-XV
e
siècles, ULg, 2008-2009
les souverains, considérant l‟institution comme désuète, ne jugèrent plus utile de prétendre au
titre d‟avoué.
Autre phénomène déjà amorcé au Moyen Age où il connut son apogée, la récupération des
avoueries par les chapitres ou les abbayes semble encore d‟actualité durant les derniers siècles
de l‟Ancien Régime. A une échelle toutefois beaucoup plus modeste : nous n‟avons recensé
que quatre cas durant les XVII
e
et XVIII
e
siècles, dont seulement trois attestés avec certitude.
Ainsi, vers 1670, l‟abbaye de Saint-Jacques se porta acquéreur de l‟avouerie de son domaine
de Hanret
2491
, celle-là même que les comtes de Namur avaient tant convoitée au XII
e
siècle.
De même, la récupération de l‟avouerie de Crehen par le chapitre de Saint-Lambert au XVIII
e
siècle plaça-t-elle ce dernier dans la vassalité du duché de Brabant, dont l‟office mouvait en
fief de longue date
2492
. En outre, un legs opéré en 1759 permettait aux chanoines de la
cathédrale de récupérer tous les droits sur l‟avouerie de Liers
2493
. En ce qui concerne
l‟avouerie de Saint-Paul à Hamois, la situation est plus confuse. Au XVI
e
siècle, nous avons
vu que le chapitre de cette collégiale s‟opposa au prince-évêque à son sujet. Compte tenu de la
mention des droits d‟avouerie dans les sources économiques de la collégiale au siècle suivant,
on peut penser que le chapitre était parvenu à ses fins
2494
. Il s‟agirait donc du seul cas connu
où une collégiale liégeoise se substitua à l‟episcopus advocatus.
Pour toute une série d‟avoueries, cependant, la situation est loin d‟être aussi claire. Elles
disparaissent brusquement des sources au cours des XVI
e
ou XVII
e
siècles. Par exemple les
avoueries de Streel (1557)
2495
et de Marloie (1667)
2496
dans la mense épiscopale ; celle de la
bonne ville de Thuin (1612)
2497
; Breust (1520)
2498
, Wonck (1523)
2499
, Bleret (1529)
2500
,
Nandrin (1587)
2501
Auxquelles il faut ajouter la plupart des domaines des abbayes de Saint-
Jacques et de Saint-Laurent, dont les avoués sont totalement méconnus durant l‟Epoque
moderne. Certaines avoueries importantes de la mense épiscopale, comme celle de
Franchimont, n‟échappèrent pas non plus à la règle : celle-ci s‟évanouit complètement de la
documentation après que les La Marck aient renoncé définitivement à leur charge, au début du
XVIII
e
siècle
2502
.
Dès lors, une question cruciale se pose. Qu‟advint-il de toutes ces avoueries ? A défaut d‟un
dépouillement systématique des sources de la période moderne, il est difficile d‟apporter une
réponse définitive. Toutefois, un fait est clair : lors des reliefs de fiefs, qui sont généralement
bien documentés pour la fin de l‟Ancien Régime, on observe soudainement que l‟avouerie
n‟est plus citée, tandis que le fief auquel celle-ci se trouvait attachée continue d‟être relevé par
le même lignage et qu‟il n‟existe pas de trace de transfert ou de suppression « officielle ». Il
est donc permis de penser que, quand bien même elles auraient survécu, ces avoueries étaient
2491
E. GERARD, Canton d’Eghezée, Namur, 1931, p.21 & 42-44 ; C.G. ROLAND, Ibidem, p.219.
2492
J. DARIS, Notices historiques…, op.cit., t.12, p.137-138.
2493
Communes de Belgique, op.cit., t.1, p.861.
2494
P.J. DEBOUXHTAY, Les possessions de la collégiale Saint-Paul..., op.cit., p.46 et 48.
2495
E. PONCELET, Chartes de St.Pierre..., op.cit., p.395. Les dates placées entre parenthèses correspondent à la
dernière mention connue de l‟office.
2496
S. BORMANS, Seigneuries féodales, op.cit., p.237-239.
2497
L. DEVILLERS, Documents..., op.cit., p.147.
2498
J.G. SCHOONBROODT, Chartes de St.Martin..., op.cit., n°688 et 689.
2499
O.J. THIMISTER, Chartes de St.Paul..., op.cit., p.521.
2500
CSL, t.6, n°1217, p.223.
2501
P. DELREE, Nandrin..., op.cit., p.8-9 et 28-34.
2502
Le dernier à revendiquer l‟office fut Louis-Pierre de La Marck (1654-1750). Concernant ce personnage, cf.
B. DEMOULIN, Recueil des instructions aux ambassadeurs..., op.cit., p.217-223 ; J. DE CHESTRET, La maison de
La Marck..., op.cit.