
P. CARRÉ, Les avoueries des églises liégeoises, XI
e
-XV
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siècles, ULg, 2008-2009
deux et quatre. Il semble cependant qu‟on prit l‟habitude de choisir un collège arbitral en
nombre impair afin d‟éviter les désaccords. Une autre méthode pour parer à un éventuel
désaccord consistait à nommer un arbitre supérieur muni de pouvoirs plus importants que
ceux de ses collègues. A Malines, en 1268, ce furent même deux arbitres supérieurs qui se
virent désigner au cas où les six arbitres déjà nommés ne parviendraient pas à s‟entendre
2460
.
En général, le collège arbitral était composé à la fois de laïcs et d‟ecclésiastiques. Les cas où il
comprenait uniquement des arbitres de l‟une ou l‟autre condition sont effectivement rares. Par
ailleurs, il ne semble pas y avoir eu de règle stricte quant à la partie représentée. Ainsi, arrive-
t-il assez fréquemment que les avoués soient représentés par un ou plusieurs
ecclésiastiques
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et les établissements religieux par des membres de l‟aristocratie militaire.
Dans les communautés religieuses, la tendance à se faire représenter par des ecclésiastiques
demeurait néanmoins la plus forte. D‟autant plus que les arbitres ecclésiastiques revêtaient
davantage d‟importance que les laïcs. Ainsi, en cas d‟absence d‟un des arbitres laïcs au
moment de trancher le litige, la sentence pouvait tout de même être prononcée. Par contre, si
l‟ecclésiastique ne pouvait être présent, celle-ci était ajournée.
Une fois les arbitres désignés, il convenait de se prémunir contre un éventuel contrevenant.
Pour ce faire, il existait diverses mesures visant à assurer le respect de la sentence. Les
garanties les plus anciennes et les plus couramment employées étaient la prestation de la fides
et du juramentum. Les deux parties devaient par exemple s‟engager devant l‟évêque de
respecter en tous points le contenu de la future sentence. Si l‟engagement était sérieux,
mettant en jeu l‟honneur et le salut éternel, il n‟était pas suffisant pour éviter les difficultés.
Aussi se trouva-t-il souvent assorti de clauses pénales. Il s‟agissait fréquemment d‟une lourde
amende qui serait infligée en cas de non respect par l‟une des parties. Les montants qui nous
sont parvenus sont effectivement fort élevés : 100 livres en 1248 dans un litige concernant
l‟avouerie de Hodeige
2462
, terre de Saint-Denis, voire 500 livres dans une autre affaire
impliquant également la collégiale Saint-Denis et son avoué de Jemeppe-sur-Sambre
(1270)
2463
. Par ailleurs, des garants étaient parfois nommés par les parties. Celles-ci pouvaient
également recourir à une autorité supérieure chargée de les contraindre à observer la
sentence : ce rôle incomba ainsi au comte de Flandre lors du règlement d‟un conflit opposant
la collégiale Saint-Jean et son avoué de Merdorp
2464
.
Le délai imparti aux arbitres pour rendre leur sentence variait lui aussi considérablement. Les
sources ne nous ont malheureusement pas livré ce détail dans chaque cas. Notons toutefois
que, le plus fréquemment, il était de l‟ordre de quelques mois, par exemple cinq mois lors du
litige opposant la collégiale Saint-Barthélemy à son avoué de Lincent (août 1267 Ŕ janvier
1268)
2465
. Des circonstances exceptionnelles pouvaient toutefois retarder considérablement la
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CSL, t.2, n°DCXXII, p.188-190.
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En 1270, dans l‟arbitrage relatif aux droits de l‟avoué de Jemeppe-sur-Sambre, terre de Saint-Denis, l‟avoué
est représenté par deux chanoines. De même, dans les litiges impliquant l‟avoué de Merdorp (1275) et de Lincent
(1267), les arbitres sont-ils de statut exclusivement ecclésiastique. L. LAHAYE, Chartes de St.Jean, op.cit., n°192,
p.101 ; J. PAQUAY, Chartes de St.Barthélemy..., op.cit., n°54, p.119-120 ; n°56 p.121. Les cas où le collège
arbitral est entièrement composé de laïcs sont plus rares. On l‟observe lors de la détermination des droits de
l‟avoué de la Cité de Liège (1241), mais il s‟agit d‟un cas particulier puisque le conflit opposait ici l‟avoué aux
bourgeois de Liège et n‟impliquait donc pas de partie ecclésiastique. Cf. CSL, t.1, n°CCCXXXIV, p.412.
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S. BORMANS, Chartes de St.Denis..., op.cit., n°30, p.55-56. Edition par E. MARECHAL, Le village et la
paroisse de Hodeige, B.S.A.H.D.L., t.15, 1906, pièces justificatives n°I et II, p.361-363.
2463
BORMANS, op.cit., n°54, p.69-72.
2464
L. LAHAYE, Ibidem, n°192, p.101.
2465
J. PAQUAY, Ibidem.