
P. CARRÉ, Les avoueries des églises liégeoises, XI
e
-XV
e
siècles, ULg, 2008-2009
gracieuse. Il avait donc pouvoir de sanctionner des laïcs tels que les avoués, d‟autant plus que
les litiges les concernant impliquaient une partie ecclésiastique
2444
.
Les sources ne nous livrent généralement que peu de détail concernant la procédure, se
contentant de faire état de la sentence prononcée par l‟official. D‟une manière générale, il
semble que l‟officialité avait coutume d‟infliger des peines relativement légères. Dans
certains cas, son intervention visait davantage à accorder les parties qu‟à sanctionner. Ce fut
le cas en 1270 dans la seigneurie de Saint-Denis à Jemeppe-sur-Sambre : le chapitre et
l‟avoué alors en conflit s‟adressèrent à l‟official afin qu‟il députe un clerc notaire, devant
lequel un accord serait conclu ultérieurement
2445
. Par ailleurs, l‟official paraît habilité pour
confirmer les décisions d‟arbitrage. Ainsi, toujours concernant l‟avouerie de Jemeppe-sur-
Sambre, c‟est devant l‟officialité que les arbitres désignés pour régler le contentieux
prononcèrent une seconde fois leur sentence.
4. Les cours de justice
L‟intervention des échevins en matière d‟avoueries est déjà attestée au XII
e
siècle : nous en
trouvons la trace en 1125, lorsque le prévôt de la collégiale Saint-Jean et son avoué de Goyer
s‟en remirent à la cour échevinale locale pour trancher le litige qui les opposait
2446
. Il faut
néanmoins attendre les XIII
e
et XIV
e
siècles pour que ce procédé se généralise. Le plus
souvent, le rôle des échevins consiste à définir les droits et devoirs de l‟avoué sous la forme
d‟un règlement. Il peut s‟agir d‟une première consignation ou de la confirmation d‟un acte
antérieur. Parfois, il est demandé aux échevins de statuer sur un point plus précis de
contestation, comme à Crehen (1269)
2447
et Jemeppe-sur-Sambre (1270)
2448
, où il leur
incombe de déterminer la part des amendes qui doit revenir à l‟avoué. En outre, les échevins
peuvent être amenés à trancher des litiges d‟un autre type, opposant par exemple deux
prétendants à la même avouerie, comme à Hamois, terre de la collégiale Saint-Paul (1297)
2449
.
Les différends relatifs aux limites juridictionnelles des avoueries entrent également dans leurs
compétences (Ougrée, 1479)
2450
.
Au départ, l‟affaire était traitée devant les justices locales. Toutefois, ces cours échevinales
présentant fréquemment un caractère subalterne, il arrivait que le litige soit porté en première
instance devant une juridiction supérieure. Celle-ci pouvait varier. Dans les exemples que
nous avons rencontrés, il s‟agissait très souvent des échevins de Liège. En matière civile, la
rencharge
2451
était de nature facultative. Elle n‟avait donc lieu que sur demande de l‟une ou
l‟autre partie, ou sur décision du tribunal lui-même
2452
. Ce dernier cas de figure semble s‟être
produit à Ougrée au XIV
e
siècle, où les échevins locaux, bien qu‟habilités pour déterminer les
2444
G. HANSOTTE, Les institutions politiques et judiciaires..., op.cit., p.182-185. A Liège, l‟official était choisi
parmi les vicaires généraux de l‟évêque et révocable à volonté.
2445
S. BORMANS, Chartes de St.Denis..., op.cit., n°53, p.69. Les véritables auxiliaires de l‟official étaient sans
conteste les notaires. Cités à partir de 1252, ils jouissent d‟une certaine indépendance et agissent au nom de
l‟official. A partir de 1283, le notaire public acquiert une place importante sans toutefois éliminer totalement le
notaire d‟officialité. Cf. P. PIEYNS-RIGO, op.cit., p.300.
2446
LAHAYE, Ibidem, t.1, n°11, p.7 ; édition critique dans J. HALKIN, Albéron I
er
…, op.cit., p.344.
2447
CSL, t.2, n°DCXXIV, p.191.
2448
BORMANS, Chartes de St.Denis..., op.cit., n°54, p.69-72.
2449
THIMISTER, Cartulaire de St.Paul..., op.cit., p.108.
2450
LAHAYE, Ibidem, t.2, n°1027 & 1032, p.32.
2451
Il y a rencharge quand une cour de première instance dicte à une cour subalterne le jugement qui doit être
prononcé.
2452
G. HANSOTTE, op.cit., p.166.