
P. CARRÉ, Les avoueries des églises liégeoises, XI
e
-XV
e
siècles, ULg, 2008-2009
particulièrement bien. Les foires et autres manifestations festives impliquaient également
certaines responsabilités pour les avoués. Les meilleurs exemples nous sont offerts par les
villes de Fosses et de Huy, avec la fête de saint Michel (29 septembre) et la foire du
Neufmoustier (21 septembre Ŕ 1
er
octobre). Dans les deux cas, le maintien de l‟ordre
incombait à l‟avoué. Les modalités différaient cependant, puisqu‟à Fosses, l‟avoué se voyait
octroyer des prérogatives seigneuriales normalement réservées à l‟évêque pendant les trois
jours que durait la fête de saint Michel. A Huy, par contre, son intervention présentait un
caractère plus indirect. L‟avoué intervenait personnellement au moment de l‟inauguration de
la foire, mais, pour le reste, il se contentait de superviser, confiant le maintien de l‟ordre à son
subalterne, le petit voué.
Notons que les manifestations festives se traduisaient parfois aussi par des obligations vis-à-
vis des institutions urbaines, tels que les échevins, auxquels l‟avoué de Fosses était contraint
d‟offrir un banquet, toujours lors de la fête de saint Michel. C‟est cependant à Liège que ces
charges nous apparaissent les plus lourdes : l‟avoué était ainsi mis à contribution pour le tiers
des dépenses liées à pas moins d‟une dizaine de fêtes annuelles. Participation à laquelle il
fallait encore ajouter des présents offerts au mayeur et à ses collaborateurs à Pâques, à la
Pentecôte, à la Toussaint et à Noël.
Reste le rôle de l‟avoué dans des circonstances plus exceptionnelles. Bien que les exemples ne
soient guère nombreux, il convient de citer l‟avouerie de Dinant où, au XV
e
siècle, l‟avoué
devait assurer la garde du prince-évêque lorsqu‟il se rendait dans cette ville
2428
. Peut-être en
allait-il de même à l‟occasion des joyeuses entrées. A la fin du Moyen Age, la participation à
celles-ci apparaît en tout cas comme un privilège ancestral des avoués de Dinant
2429
.
III. Moyens de lutte contre les avoués exacteurs
1. Les abus des avoués : aspects généraux et chronologie
Si le transfert de l‟avouerie dans les mains de l‟évêque ou d‟un chapitre constituait de loin la
solution idéale, elle n‟était cependant pas applicable partout. Loin s‟en faut. Ailleurs, là où
des avoués laïcs subsistaient, les églises liégeoises étaient confrontées aux abus et
déprédations en tous genres. Ce type de difficultés apparaît dans les sources dès la seconde
moitié du XI
e
siècle
2430
. Au XII
e
siècle, la menace devait se préciser, tandis qu‟une véritable
multiplication des abus semblait se produire au cours du XIII
e
siècle. Il s‟agit probablement,
du moins en partie, d‟une fausse impression résultant de la plus grande abondance des sources
à partir de cette époque. Néanmoins, il ne faut pas négliger le fait que le XIII
e
siècle
correspond à une transformation de l‟autorité épiscopale qui revêt de plus en plus un aspect
« principautaire ». Dès lors est-il possible que cette mutation offrit une certaine latitude aux
ambitieux, parmi lesquels les avoués
2431
.
2428
S. BORMANS, Cartulaire de Dinant, t.3, op.cit., n°294, p.245-248.
2429
Ibidem, t.2, n°82, p.49-50.
2430
Il semble que les abus des avoués étaient rares au X
e
siècle dans nos régions. Les sources de cette époque ne
nous en livrent pratiquement aucun exemple. Selon L. GENICOT, c‟est l‟affaiblissement du pouvoir central au XI
e
siècle qui permit leur développement en favorisant les desseins des princes territoriaux. Cf. Sur le vocabulaire et
les modalités de l’avouerie..., op.cit., p.29.
2431
A. WILKIN, Les biens de Saint-Lambert..., op.cit., p.290.