
P. CARRÉ, Les avoueries des églises liégeoises, XI
e
-XV
e
siècles, ULg, 2008-2009
l‟avoué pouvait vendre le bois abattu dans les forêts des environs pour ensuite partager le
produit de la vente avec l‟évêque. Ici cependant, la somme n‟était pas conservée par l‟avoué
puisqu‟il était contraint de l‟affecter à l‟entretien du château.
En vertu de l‟exercice du droit de ban, un certain nombre d‟avoués établirent un monopole
d‟usage sur divers instruments agricoles,. Ils pouvaient de ce fait obliger les habitants à
utiliser leurs moulins (Kemexhe
2406
, Momalle, Ciney
2407
), voire leurs fours ou leurs brasseries
(Nivelle-sur-Meuse). Cette obligation se trouvait assortie du paiement à l‟avoué d‟une
redevance qui, dans le cas de Momalle, s‟élevait à un quart de marc pour chaque muid moulu
(fertaille). A Nivelle-sur-Meuse, aux XIV
e
et XV
e
siècles, les profits que les banalités
rapportaient à l‟avoué étaient taxés annuellement par l‟évêque
2408
.
Dans quelques cas, le pâturage ou la glandée étaient également contrôlés par l‟avoué qui
recevait des habitants une rente annuelle à cet effet. A défaut de paiement, il pouvait prendre
lui-même les sanctions et saisir, comme à Furfooz
2409
, quelques bêtes, voire tout le troupeau.
Plus fréquent, le droit seigneurial sur les héritages, dit de mainmorte, qui fut apparemment
appliqué Ŕ légalement ou non Ŕ par un grand nombre d‟avoués au cours des XI
e
-XII
e
siècles.
Par la suite, certains d‟entre eux y renoncèrent ou se virent confirmer sa jouissance, à
condition d‟en partager les revenus avec le seigneur ecclésiastique (Jemeppe-sur-Sambre,
1270 ; Ottoncourt, 1280). D‟autres avoués continuèrent d‟exercer cette prérogative jusqu‟au
moins le XIV
e
siècle, tel celui de Streel
2410
. La part de l‟héritage prélevée en vertu du droit de
mainmorte pouvait atteindre la moitié. Plus radicale encore, était la formorture
2411
, forme
germanique de la mainmorte qui s‟appliquait dans le cas où les enfants du défunt étaient
émancipés. Revenant semble-t-il à la confiscation de tout l‟héritage, elle se rencontre
notamment dans l‟avouerie de Saint-Jacques à Hanret.
Le droit de relief devait assurer quelque revenu à beaucoup d‟avoués, puisque nombre d‟entre
eux concédaient des fiefs, à commencer par ceux qui possédaient une cour féodale ou une
cour de tenants. Mais son application pouvait s‟avérer bien plus large et toucher les reliefs de
fiefs opérés devant le seigneur ecclésiastique et qui ne concernaient donc pas l‟avoué d‟un
point de vue féodal. A la fin du XIV
e
siècle à Amay, celui-ci pouvait en effet prélever le tiers
du droit de relief perçu par le chapitre de Saint-Lambert. De même, aux XIII
e
et XIV
e
siècles,
le chapitre de Saint-Denis devait-il la somme de 2 ou 3 deniers à l‟occasion de chaque
investiture dans ses domaines de Hodeige
2412
et de Lens-sur-Geer
2413
.
Le droit d‟abornement se révélait fort semblable : pour le placement de chaque borne, l‟avoué
recevait une somme fixe dont le montant s‟élevait généralement à 2 ou 3 deniers durant le
XIV
e
siècle. Les opérations d‟abornement ou cerquemanage n‟impliquaient cependant pas
directement l‟avoué : elles étaient effectuées par le mayeur et les échevins, éventuellement
l‟essaim influait sur le partage. Ainsi, s‟il était trouvé dans les branches d‟un arbre, l‟avoué en aurait le tiers. Par
contre, si les abeilles étaient regroupées en bas de l‟arbre, la totalité reviendrait à l‟abbé. Document édité par
C. LECLERE, Les avoués de Saint-Trond..., op.cit., pièce justificative n°VI.
2406
L. LAHAYE, Chartes de St.Jean..., op.cit., n°98, p.53-54.
2407
Cartulaire de Ciney, n°43, p.116-117. Notons que nous sommes alors en 1584 : ce privilège est reconnu à
l‟avoué par le prince-évêque Ernest de Bavière.
2408
J. DEBOUXHTAY, op.cit., p.116.
2409
E. GERARD, Le canton de Dinant, Namur, 1940, p.135.
2410
E. PONCELET, Les feudataires d’Englebert de la Marck..., op.cit., p.133.
2411
L. GENICOT, L’économie rurale namuroise..., op.cit., t.1, p.169-170.
2412
S. BORMANS, Chartes de St.Denis..., op.cit., n°30, p.55-56.
2413
Ibidem, n°91, p.95-97.